Le patrimoine local regorge d'ouvrages à restaurer à l'image de cette marquise. Le patrimoine local regorge d'ouvrages à restaurer à l'image de cette marquise.
C’est une petite pépite familiale. Cette entreprise est installée depuis des décennies dans le centre d’une ville huppée de l’ouest parisien. Il y règne un état d’esprit particulier. Les fils de l’ancien dirigeant veillent à conserver et entretenir le lien avec cette clientèle certes aisée, mais exigeante.

Serrurerie Jolivel au Vésinet (78)

Des établissements comme celui-ci, il n’en subsiste plus beaucoup en France. C’est une serrurerie-métallerie atypique dans une ville tout aussi atypique. La serrurerie Jolivel a son adresse depuis 1946 dans cet espace étroit d’à peine 100 m2 au cœur du Vésinet, à deux pas de son église. C’est Henri Jolivel qui s’y installa après la guerre tout juste armé d’une enclume, d’une cisaille à main, de quelques outils et de beaucoup de bonne volonté. Il a eu du flair. En effet, Le Vésinet, à l’ouest de Paris, est une ville imaginée par Alphonse Pallu et sortie de terre au milieu du XIXe siècle. La « ville parc » est truffée de superbes villas nécessairement dotées de grilles, de portails, de marquises et de rampes. Il y a toujours eu de l’activité pour celui qui sait s’y prendre. Car il règne dans cette banlieue cossue un esprit particulier. Alain Jolivel, fils d’Henri et précédent dirigeant, nous avait dit en 2001, « Il faut comprendre Le Vésinet pour pouvoir y travailler ». Cette clientèle a beau être aisée, voire richissime, elle n’est pas adepte du tape-à-l’œil. « Les gens ici ne sont pas des frimeurs et n’apprécient pas le démarchage, c’est vulgaire à leurs yeux », expliquait l’ex-président des métalliers des Yvelines qui vit aujourd’hui avec sa femme Danièle près du Bassin d’Arcachon.

S’il y en a deux qui connaissent l’esprit du Vésinet, c’est bien Nicolas et Laurent, les fils de Danièle et Alain. Ils se sont répartis le travail par affinités.

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© Pyc
Un vieil atelier avec de jeunes compagnons...

Une complémentarité sur deux activités

Nicolas prend en charge la partie serrurerie (agréé Picard serrures), portes blindées, stores, motorisation, menuiserie aluminium, fermetures d’habitation et dépannage. Laurent est quant à lui responsable de la fabrication en métallerie et en ferronnerie. Ces deux créneaux distincts assurent une complémentarité et une polyvalence permettant de mieux encaisser les moments de baisse d’activité. Cela fait de Jolivel un cas à part parmi les entreprises locales qui ne sont pas sur ces deux terrains en même temps. La partie métallerie se porte plutôt bien. « Nous avons cinq mois d’avance et toujours de beaux projets en perspective », annonce Laurent Jolivel. Les réfections de marquises, les rampes supplémentaires pour les personnes âgées, les cloisons intérieures métalliques, les menuiseries acier… Ce sont là quelques-uns des lots courants. Il y a aussi les portails à refaire à l’identique, ou presque. « À l’origine les portails ont une largeur de 2,5 m. Or, les voitures ont gagné en largeur depuis quelques années ; les SUV se sont généralisés. Cela offre des opportunités de chantier ». Jolivel y est attentive au réemploi. Le but n’est pas de tout changer, mais bien d’agrandir en gardant l’esprit. Un des poteaux est détruit puis reconstruit à l’identique et le portail est reconstruit avec la plupart du temps une motorisation enterrée. Jolivel se développe bien aussi sur le créneau des portes blindées pour les appartements. « Depuis la crise sanitaire et la généralisation du télétravail, les clients sont devenus plus sensibles au bruit dans leur habitation. Les portes blindées apportent non seulement la sécurité mais aussi une insonorisation élevée », souligne Nicolas Jolivel. Les stores et les volets connaissent une belle croissance notamment pour se protéger des surchauffes estivales. Aussi l’entreprise répond au développement des aménagements extérieurs en mobilier et autres pergolas dont l’usage se prolonge durant l’année avec les températures plus clémentes.

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La devanture est "dans son jus".

On dessine à la main

Côté moyens de production, c’est « frugal ». Dans l’atelier d’à peine 50 m2 il y a une forge, deux postes à souder, une scie à ruban, une perceuse sur colonne et de l’outillage à main… Pas de plieuse ni cisaille, les tôles sont livrées prédécoupées à la dimension souhaitée. À la conception des ouvrages de métallerie, c’est le dessin à la main sur photo qui prédomine. « Mon père s’était mis à la DAO avec Métal Cad. Je remarque que je suis plus rapide pour faire le croquis d’une marquise à la main sur l’image d’une maison et les clients en sont satisfaits », note Laurent Jolivel. Les choses devraient changer dans le courant de l’année 2023. « Nous avons acquis un local de près de 300 m2 avec une mezzanine dans une ZAC à Poissy ». À vingt minutes du Vésinet, la métallerie va se donner un peu d’air et gagner en confort de travail. D’autant qu’ici on mise sur les jeunes. Ils ne sont pas moins de trois apprentis à travailler chez Jolivel, soit un tiers des effectifs. C’est exceptionnel ! Rares sont hélas les PME de plus de vingt salariés qui prennent plus de deux apprentis… « Nous cultivons l’esprit de famille et cela nous rend sans doute plus attractifs aux yeux des jeunes. Même si nous n’avons pas le dernier cri en termes de technologie, ils apprécient de pouvoir travailler sur de beaux ouvrages à poser dans des environnements souvent prestigieux », insiste Nicolas Jolivel. C’est donc un savant mélange de tradition, d’emplacement, d’état d’esprit et de professionnalisme qui fait que cette TPE est toujours en vie. L’entreprise Jolivel est à l’image du Vésinet. Solide et discrète avec un penchant certain pour le travail dans les règles de l’art.

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Le vieillissement de la population assure des travaux de rampes, entre autres.

Entreprise : Alain Jolivel Serrurerie

Effectifs : 9 dont 3 apprentis

Chiffre d’affaires : 900 000 euros HT

Surface couverte : 100 m2

Investissement récent : Nouvel atelier de 264 m2 + 90 m2 de bureau

Nicolas et Laurent Jolivel

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Nicolas (43 ans) est chaudronnier de formation alors que Laurent (40 ans) a été d’abord vendeur avant de passer son CAP de métallerie en un an chez les Compagnons du devoir. Il a été parmi les premiers titulaires du CQP chargé d’affaires junior (en même temps que Mathieu Hulin). Les deux frères se partagent la direction de l’entreprise familiale depuis le départ à la retraite de leur père Alain en 2007. Nicolas a, en plus de son activité stores, volets, motorisation, fermetures, un bon sens de la communication. Notamment sur les réseaux sociaux et sur Internet, où, avec de peu de moyens, il réussit de jolis coups de promotion pour sa structure et indirectement aussi pour le métier.

www.jolivelserrurerie.com