Il y a un siècle, la commune de Romainville était couverte de zones maraîchères qui alimentaient la capitale en fruits et légumes frais. Il y a un siècle, la commune de Romainville était couverte de zones maraîchères qui alimentaient la capitale en fruits et légumes frais.
En lieu et place d’un immeuble de logements se dressent aujourd’hui deux tours largement vitrées. Ce sont des serres destinées à faire pousser des fruits et des légumes. La volonté est aussi de transmettre la connaissance sur le monde végétal.

Des tours pour cultiver le vivant

C’est une première européenne. Les deux tours érigées il y a un an à Romainville, en banlieue Est de Paris, sont des serres urbaines. Conçues par Ilimelgo Architectes associée à l’agence Secousses, elles adoptent une modénature d’usine des années trente, comme pour mieux signifier qu’ici il est question de production. Dans un contexte de densification extrême et de besoins élevés en logements sociaux, l’ancienne maire Corinne Valls a dû batailler pour réussir à mener à bout ce projet innovant. Il faut rappeler que cette commune a longtemps été une zone réputée pour ses maraîchages dont la production était à destination notamment des marchés de la capitale. Or, les anciens jardins ont été bétonnés. Des immeubles et des parkings ont recouvert les sols plantés. L’idée de « cultiver la ville » avec des immeubles serres va nécessairement concerner un nombre grandissant de métropoles. L’agriculture urbaine est encore en phase d’exploration voire de tâtonnements. D’ores et déjà, la Cité Maraîchère de Romainville compte parmi les premières vitrines de cette démarche.

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© Sandrine Marc
En fonction de la pousse des plantes, les jardiniers déplacent les bacs en Inox pour profiter d'un maximum d'ensoleillement. /Logiquement, c'est sous la toiture que l'exposition lumineuse est la plus forte.

Une ossature béton habillée de verre

Ce sont deux tours parallèles de 7 m de large, l’une en R +3 et l’autre en R +6 créant 1 000 m2 de surfaces d'exploitation. Le niveau de sous-sol est destiné à la culture de champignons et d'endives. En ossature béton pour pouvoir supporter les charges importantes (1 tonne / m2) et l’omniprésence de l’eau, elles sont vitrées sur toute leur hauteur. Les toitures à deux pans et entièrement vitrées, disposent d’ouvrants motorisés comme c’est le cas dans les serres horticoles à la campagne. Contrairement aux apparences, la façade n’est pas un mur-rideau. L’entreprise CMF Bâtiment spécialiste des serres et basée à Loireauxence (44), a réalisé une ossature secondaire en tubes d’acier galvanisés qui a été fixée sur les poteaux en béton. Cette structure métallique a ensuite reçu les grands modules vitrés étage par étage en démarrant par le bas. Il s’agit d'ensembles préfabriqués en atelier réalisés à partir d’un profil aluminium à rupture thermique (gamme Eco Klima développée par CMF), avec du double vitrage de verre clair. Il y a des châssis fixes et d’autres ouvrants. « Habituellement dans une serre horticole, il n’est pas nécessaire d’utiliser du double vitrage. Ici nous avions le souci de garder tout de même un maximum de chaleur à l’intérieur. Aussi il y a l’aspect sécurité qu’il fallait prendre en compte. Je pense au risque de grêle ou au jet de pierre, par exemple », note Alain Barré, chargé d’affaires pour CMF. La différence avec le vitrage pour un usage tertiaire ou d’habitation c’est qu’ici il n’y a pas d’isolation acoustique ni aucune propriété de protection solaire comme cela est courant sur certains verres à couches. Les deux bâtiments serres ne sont pas chauffés tout juste un aérotherme assure-t-il la mise hors gel de la zone de culture. La ventilation et la régulation du climat sont assurées par les ouvrants en toiture reliés à une GTB.

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© Pyc /© Pyc
Les moteurs des ouvrants en toiture sont pilotés par une GTB. /Au rez-de-chaussée se trouve un café-restaurant qui transforme une partie de la production.

Un circuit on ne peut plus court

Une des principales contraintes avec laquelle les architectes ont dû composer est la gestion des ombres. « Les ombres portées sont l’ennemi numéro un des producteurs et c’est la limite de ce type de serres urbaines », note Alain Barré. Il y a non seulement les ombres des immeubles voisins mais aussi ceux des niveaux béton supérieurs sur les niveaux inférieurs. L’astuce consiste alors à déplacer les bacs inox contenant les cultures en fonction de l’état de croissance des plantes. La meilleure luminosité est logiquement obtenue au dernier niveau, sous la toiture. Valérian Amalric, architecte, est conscient de cette contrainte. « La courbure solaire a dicté la forme des bâtiments, il y a la prise en compte de paramètres héliomorphiques », dit-il. De fait, cette opération n’est pas destinée à faire preuve d’un rendement maximum. « Il s’agit autant d’un laboratoire d’agriculture urbaine que d’un projet culturel pédagogique », insiste l’architecte. La production annuelle de fruits et légumes devrait atteindre une quinzaine de tonnes par an en moyenne, ce qui n’est pas insignifiant. Une grande partie est commercialisée directement aux habitants du quartier, l’autre est transformée dans le restaurant du rez-de-chaussée. Entre l’atelier découverte pour les enfants, le restaurant et la production maraîchère, cette expérience urbaine insolite a le mérite de sensibiliser les riverains au vivant et au goût dans un circuit on peut plus court.

Maîtrise d’ouvrage

Ville de Romainville

Maîtrise d’œuvre

Ilimelgo architectes mandataires, Secousses associés

Gros œuvre

Eiffage Construction

Charpente métallique, enveloppe

CMF Bâtiment

Budget travaux

5,1 millions d’euros