Le réveil rapide des économies aux USA et en Chine a eu pour effet d’absorber une part importante des matières premières en circulation. L’Europe doit faire face à une hausse inédite des prix. Faut-il craindre la pénurie ?

La situation est problématique. Alors que les pays européens sortent progressivement des restrictions sanitaires, leurs économies doivent faire face à une flambée des prix des matières premières et une menace de pénurie sur une large palette de produits. La principale cause ? Le redémarrage des économies aux USA et en Chine. Les matériaux utilisés par les métalliers et les constructeurs métalliques sont tous impactés. Aussi bien les métaux (acier et aluminium), que le verre mais aussi la peinture. Pour mieux mesurer l’ampleur de situation sur l’acier, il faut avoir à l’esprit que la production européenne s’est arrêtée durant la période de confinement. Comme le rappelait Stéphane Duclos (ArcelorMittal) lors d’une réunion des partenaires de l’Union des métalliers le 19 mai, « un haut-fourneau ne se redémarre pas comme un four à micro-ondes ». Parallèlement il faut se souvenir que la Chine, longtemps accusée de faire du dumping sur l’acier en subventionnant sa production, privilégie désormais son marché intérieur. Si l’on ajoute à cela des événements climatiques exceptionnels, un incendie dans une usine de résines pour peinture et des tensions sur le fret maritime, le tableau se noircit encore.

L’effet est sans appel : moins de matière et une hausse de la demande entraînent une flambée des prix. Celle-ci atteint jusqu’à 80 % sur plusieurs types de produits. Certains devis affichent des validités de 48 heures ! Du jamais vu. Des délais de livraison peuvent passer de quelques semaines à plusieurs mois et des d’équipes commerciales de fournisseurs sont en « stand by » pour ne pas prendre de nouvelles commandes. Dans une récente enquête menée par l’Union des métalliers, il apparaît que 50 % des dirigeants du secteur annoncent avoir subi « une hausse des prix de plus de 30 % » et 47 % d’entre eux auraient même déjà été confrontés à « l’impossibilité de passer commande ».

Brutalité de la hausse

Franck Perraud, président de l’Union des métalliers, garde cependant la tête froide : « les prix de l’acier avaient beaucoup baissé ces dernières années, ça n’est donc pas tant la hausse qui pose problème, mais sa brutalité. C’est une situation dure face à laquelle nous nous sentons impuissants ». Le dirigeant de Perraud & Associés dans l’Ain, ne pense pas qu’il y aura « pénurie » à long et même à moyen termes, mais qu’il y aura « une poursuite du rallongement des délais de livraison ». La situation se tend aussi pour des raisons géopolitiques inattendues. Pascal Lacosta, dirigeant de SM Gargini dans le Gard, a rappelé, par exemple, qu’une « partie des poudres thermodurcissables utilisées pour la peinture sont fabriquées en Turquie et qu’en raison de la pandémie mais aussi des tensions politiques, la circulation des marchandises a été interrompue ».

La menace d’une interruption des chantiers est pourtant déjà une réalité dans de nombreux départements. La FFB a ainsi formulé plusieurs demandes au gouvernement : promouvoir l’indexation des prix et la suspension transitoire des pénalités de retard quand les problèmes d’approvisionnement sont avérés, ainsi que la prolongation du chômage partiel en cas d’arrêt faute de matériaux.

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