Quel est l'intérêt de faire faire à des jeunes en formation des ouvrages qui sont sytématiquement jetés à la benne après notation ? Il est peut-être temps de changer de "pédagogie".

Que transmettre avec des pièces poubelle?

Ça n’est un secret pour personne, ce qui prime pour une part considérable de la jeune génération c’est la quête de sens. Les jeunes s’interrogent aujourd’hui plus que les générations précédentes sur le sens de ce que leurs ainés s’efforcent de leur enseigner. Ils demandent « à quoi ça sert ? » Je ne me souviens pas avoir un jour interrogé mes profs sur le « sens » des matières que j’avais à travailler. Même sans passion particulière pour certaines d’entre elles, je m’y collais sans rechigner. Ça marche moins désormais. Face à la difficulté réelle qu’il y a à attirer et à garder les élèves dans les formations en métallerie, il y a un point sur lequel les formateurs devraient s’interroger : quel est le sens des « pièces poubelle » ? Est-ce vraiment efficace de faire travailler sur des ouvrages qui n’ont aucune fonctionnalité et qui finissent systématiquement à la benne après avoir été notées ?

Pur gaspillage

Qu’est-ce que se passe dans la tête du jeune quand il voit sa pièce sur laquelle il a investi du temps et de l’effort, dont il peut être fier même, dans la poubelle ? Il y a un mot pour ça, c’est « gaspillage ». Ça n’est ni dans l’esprit du temps, ni écologique, ni économique et je doute que ce soit un bon levier pédagogique. S’il faut faire faire un cadre en cornières à celle ou celui qui démarre sa formation, autant lui proposer d’encadrer un tableau qui est chez lui. Il le verra tous les jours et ses parents pourront lui en être reconnaissants. Quelle fierté tire-t-on des pièces poubelle ? Aucune. Me vient le souvenir de ces élèves du lycée pro de Coutances qui avaient réalisé les remorques d’un club de voile. Même la presse locale en avait fait écho. L’idée venait de l’enseignant en métallerie. Selon lui, le risque vaut largement d’être pris. Il y a certainement une piste à explorer et à généraliser.

Photo : © Kinga Lopatin