Un habillage réalisé en métal déployé en aluminium brut par l'entreprise Métallerie de l'Authion. © cabinet Bernard Buhler
Un habillage réalisé en métal déployé en aluminium brut par l'entreprise Métallerie de l'Authion.
L’aluminium est largement employé en menuiserie. Ce métal peut également être une bonne alternative pour certaines applications de métallerie sur lesquelles le premier réflexe serait d’utiliser l’acier. Plus léger, plus résistant à la corrosion, moins contraignant à poser, le matériau se défend avec de solides arguments.

Comment bien démarrer la métallerie aluminium

Avec une densité de 2,7 contre 7,8 pour l’acier, l’aluminium se distingue par sa légèreté. Il se décline en un nombre important de nuances selon l’application finale. Pour les travaux de métallerie courante, l’éventail se réduit. On retrouve ainsi pour les barres et tubes la nuance AW6060T6 liée au procédé de production par extrusion. Pour les tôles, parmi les plus courantes avec de bonnes aptitudes au pliage et au soudage, ce sont les nuances AW5754H111 et AW1050H24 qui sont à retenir et le AW5756H111 pour un environnement plus agressif (bord de mer). Les détracteurs remettent en cause son bilan carbone… Le procédé de fabrication est en effet énergivore pour transformer le minerai en un produit fini mais sur une durée de vie globale, l’aluminium se recycle remarquablement et à l’infini avec une mise en œuvre énergétique moindre. Le frein est donc levé. Ce qui est désigné par « métallerie aluminium » consiste à travailler des plats, des tôles, des ronds, des tubes en aluminium comme on le ferait pour de l’acier. À l’inverse des profilés de menuiserie qui sont assemblés mécaniquement et exceptionnellement soudés. Cotés ouvrages les possibilités sont immenses : du garde-corps aux éléments de façades, en passant par du mobilier, des luminaires, des escaliers, des brise-soleil voire des œuvres d’art ou des jardinières sur des rooftops.

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© SD
Une gamme de disques dédiés pour l’aluminium existe chez certains fabricants.

Débit : quelques précautions à prendre

Le débit des barres d’aluminium ne présente aucune difficulté. Malgré tout, les scies à lames carbures sont à privilégier pour une coupe rapide, nette et sans bavure. Pour des travaux ponctuels, la scie à ruban convient parfaitement en prenant soin de privilégier une grande vitesse de défilement, une denture importante et sans lubrification (sinon il faudra dégraisser !).

Le cisaillage des tôles se fait sans problème avec une machine conventionnelle. Pour une coupe plus nette et sur des machines à jeu réglable, l’entre fer des lames peut être légèrement réduit par rapport à un réglage destiné à de l’acier. À ce sujet, il est utile de rappeler qu’il est préférable d’utiliser des lames neuves qui n’ont pas déjà coupé de l’acier, justement afin d’éviter tout risque d’apparition de traces de rouille.

Pour la découpe numérique, le procédé le plus facile et le plus rapide sur toutes les épaisseurs, y compris très forte, est le jet d’eau. En effet, il faut savoir que l’aluminium absorbe beaucoup d’énergie thermique lors d’une découpe laser ou plasma. La découpe plasma fonctionne mais la qualité est tout de même affectée avec les postes à air comprimé. La qualité de la coupe peut être améliorée avec des mélanges de gaz comme l’argon + hydrogène. Les machines laser utilisent l’azote comme gaz et procurent une coupe d’excellente qualité jusqu’à 10 ou 12 mm d’épaisseur.

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© Pyc
Fabrication d'un habillage de façade en aluminium dans l'atelier de SMG.

Le pliage et ses «petits trucs»

La réalisation de pliages sur les tôles d’aluminium ne présente pas de difficultés particulières. Le matériau se travaille même plutôt facilement. Cependant, certaines nuances peuvent occasionner des craquelures. Dans le cas de feuilles prélaquées ou anodisées, il faut s’assurer des aptitudes au pliage car le pli extérieur subit un allongement important qui modifie l’aspect de l’arrête (blanchiment important avec un RAL 7016 par exemple). La principale difficulté du pliage de l’aluminium est de limiter les marques de pliage occasionnées par le frottement du vé. Pour contrer ce problème, plusieurs parades existent. Sur les fines épaisseurs, le plus simple est d’utiliser des tôles filmées ainsi qu’un vé un peu plus large et doté de bords arrondis. Il existe également des outils polyamides mais cela constitue un investissement spécifique. Sur les épaisseurs plus importantes, un léger voile de lubrifiant facilite le glissement et réduit franchement les marques. Attention néanmoins à nettoyer régulièrement le vé pour un travail optimal.

Subtilités du perçage et du taraudage

L’aluminium est globalement facile à usiner car il requiert peu d’efforts. Attention toutefois, il a cette caractéristique d’être « collant », les copeaux adhèrent aux outils, ce qui peut amener brutalement à la cassure. Pour le perçage, il faut privilégier un foret avec un angle d’affûtage à 135° et une goujure à 35° pour une bonne évacuation des copeaux. Si le chantier est important, il est préférable d’acheter des forêts spécifiques avec un revêtement favorisant le glissement des copeaux. Le taraudage est plus technique : les tarauds dédiés (bague jaune) disposent pour les plus performants d’un pas alterné afin de réduire les frottements et d’améliorer l’évacuation du copeau. Ces tarauds existent en version « à refouler », pour trou débouchant ou borgne. L’utilisation d’un lubrifiant spécifique améliore l’usinage. Selon le contexte, pour des questions de résistance, la pose d’inserts peut être une bonne alternative à envisager.

L’aluminium se soude convenablement depuis l’apparition des procédés à protection gazeuse (TIG et MIG) mais le procédé de soudage reste un peu délicat.

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La difficulté d’une soudure est d’obtenir rapidement la température de fusion.

Quelques conseils avant de souder

Les raisons ? La couche superficielle d’alumine qui se forme naturellement à la surface du métal constitue une sorte de peau qui, sans un procédé spécial, empêche le soudage de deux bouts d’aluminium ; l’autre souci réside dans son excellente conductivité thermique. En effet, malgré un point de fusion assez bas (environ 660 °C), la diffusion de la chaleur étant rapide, l’arc de soudage doit apporter beaucoup d’énergie pour maintenir le bain de fusion à température. L’ennemi de la soudure est l’hydrogène qui se forme en présence d’humidité et de graisse. Pour le soudage, la propreté des bords de joints est donc impérative (sec et dégraissé) ; un chanfrein est également souhaitable mais à réaliser avec des outils coupants (disque ou fraise carbure). Le disque à ébarber est à proscrire car il laisse des inclusions de corindon.

Le TIG pour les faibles épaisseurs

Un poste TIG doit impérativement être à courant alternatif (AC), c’est la condition pour casser la couche d’alumine. Pour faire simple, le poste va générer du courant continu en alternant la polarité de la pièce. Dans un sens, le flux d’électrons va chauffer la pièce, dans l’autre il va disperser la couche d’oxydes superficielle. Le soudeur doit alors régler l’ampérage selon l’épaisseur de la pièce et la fréquence d’alternance du courant. La quantité d’énergie étant importante, il faut privilégier une torche refroidie. L’électrode est en tungstène pur (bout vert) et le gaz de protection est l’argon. Un mélange d’argon + hélium accélère la montée en température du bain et donc la productivité. Ceux qui l’utilisent ne reviennent pas en arrière !

Le soudage MIG aluminium

S’il est techniquement possible de souder avec un poste traditionnel, un appareil capable de délivrer un courant pulsé confère une productivité incomparable et un amorçage sans failles (ou presque !). L’opération de soudage peut s’avérer plus ou moins capricieuse… En effet, les principaux problèmes rencontrés sont les bourrages de fil et l’amorçage. Une attention toute particulière doit être apportée au dévidage du fil avec des galets à gorge demi-ronde, une torche avec une gaine en téflon à réserver pour l’aluminium ainsi qu’un tube contact dédié avec un diamètre légèrement plus important. Il est préférable d’avoir une torche courte (3 m) et refroidie. Quant au fil, il faut privilégier autant que possible un diamètre de 1,2 mm qui apportera plus de rigidité. Ces détails n’en sont pas et participent concrètement à la réduction des risques de bourrage.

Lors du soudage, l’une des difficultés est d’obtenir rapidement un bain de fusion satisfaisant. Pour y parvenir, il existe une fonction « hot start » permettant que le poste augmente automatiquement l’ampérage en phase d’amorçage (30 % durant quelques secondes). Le soudeur peut également effectuer un préchauffage de la matière à environ 100 °C avec un chalumeau, surtout si une des pièces est plus massive que l’autre.

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© Saf
Le TIG sur aluminium suppose de pouvoir casser la couche d'alumine sur la surface du métal.

Des abrasifs spécifiques indispensables

La nature même de l’aluminium rend quasi impossible l’utilisation des abrasifs courants même pour un petit travail : bourrage assuré et efficacité réduite. Pour s’adapter à cette matière bien spécifique, certains fabricants présentent une gamme de disques dédiés. Würth, Pferd, Rhodius ou encore TAF proposent des disques à tronçonner en épaisseur 1 ou 1,6 mm, des meules à ébarber et des disques à lamelles. Les disques fibres sont aussi généralement proposés au catalogue. Pour les spécialistes, Pferd a même développé un disque à plaquettes carbures dédié à la chaudronnerie aluminium.

Se lancer dans le travail de l’aluminium n’a donc rien d’insurmontable moyennant quelques précautions. Le seul point incontournable est d’investir dans un poste à souder si le matériel disponible n’est pas compatible et prendre le temps de se faire la main. Les déformations lors du soudage peuvent être importantes, il faut les appréhender.