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La menuiserie acier se porte bien. Les fournisseurs sont au rendez-vous avec des gammes qui, ces vingt dernières années, se sont enrichies de nouvelles fonctionnalités. L’effort sur le design s’est avéré payant. Le marché de la rénovation est potentiellement considérable et les architectes sont séduits.

Il y a plus de vingt ans, Michel Vignes qui dirigeait à l’époque Descasystem, distributeur lyonnais de la gamme Jansen, nous parlait de l’avenir de la menuiserie acier : « Ne donnons pas une fausse image de ce marché qui reste un petit créneau. Dans le secteur de la fenêtre par exemple, l’acier est très peu présent… » En effet, la fenêtre acier avait quasiment disparu du paysage. Hormis les portes d’entrée de halls d’immeubles, des cloisons coupe-feu, des verrières de grands projets tertiaires… l’acier faisait profil bas. Non pas que le matériau ne se soit pas adapté aux réglementations thermiques puisqu’il existait déjà des profils à rupture thermique (la gamme Janisol a été lancée à la fin des années quatre-vingt). Les raisons du déclin étaient multiples et tenaient avant tout à une absence de « dynamique esthétique ». Reconnaissons que la culture germanique qui prévaut chez les fournisseurs, n’était pas, à cette époque, consciente du formidable potentiel esthétique de leur matière première… Il aura fallu attendre l’électrochoc de la gamme Fineline chez RP Technik (ex Mannesmann) pour qu’une mutation s’engage. Le moins que l’on puisse dire est que le marché s’est depuis solidement réveillé et redressé. Voici cinq points qui expliquent cette renaissance réjouissante.

1. Les gammistes sont toujours là !

Ça peut paraître simpliste, mais une filière et un créneau de marché, aussi réduit soit-il ne peut pas perdurer sans industriels fournisseurs bien établis. Forster, Jansen et RP Technik ont poursuivi leurs développements techniques et commerciaux pour permettre le renouveau de la menuiserie acier. Il y a même eu des rachats et des regroupements. L’allemand Welser qui fabrique des profils pour plusieurs gammistes a vendu en 2020 sa filiale RP Technik au suisse Jansen et Forster (également suisse) appartient depuis 2017 au groupe familial belge Reynaers. Entre-temps, d’autres sont venus sur le marché. Originaires d’Italie, Ottostumm et Secco Sistemi ont, durant les vingt dernières années, pris leurs marques en France et élargi l’offre avec des produits différenciants. Outre un design original et abouti, ces deux marques proposent en plus de l’acier brut et électrozingué des profils en laiton, en Corten et en Inox.

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© DR
Un châssis fixe et une porte automatique coulissante réalisés en profils Presto XS de Forster.

2. Les gammes s’étoffent

Il y a vingt ans l’offre était « solide » au sens propre du terme… En façade comme en menuiserie il était question de répondre avec des arguments techniques « solides » aux besoins de la construction neuve. De fait, esthétiquement il n’y avait que peu de différence avec les gammes en aluminium qui de leur côté ont été dans une forte dynamique sur le design et les performances. L’acier a gardé ses atouts en les complétant d’innovations notables : les possibilités de faire de l’oscillo-battant, des châssis repliables, d’avoir les paumelles cachées, un grand choix en quincaillerie, d’intégrer des moteurs… Mais surtout les performances sont désormais validées par des PV d’essais sur tous les terrains de la sécurité que ce soit le feu, l’effraction, le pare-balles ou l’explosion. Idem pour l’isolation phonique et thermique. Jusqu’à des niveaux extrêmes et dans des dimensions elles aussi extrêmes. Des innovations telles que l’Unico de Forster, une gamme isolée avec une maille Inox qui sépare deux coques en acier, une solution 100 % métallique, ont vitalisé le marché. Enfin, il y a l’élan de la finesse ! Tous les gammistes proposent au moins un profil fin. Le marché visé est celui de la rénovation des bâtiments anciens (particulièrement celui du début XXe siècle) mais aussi le neuf. Des gammes froides reprennent un essor avec l’engouement du public pour les cloisons vitrées intérieures et les jardins d’hiver à « l’ancienne ».

La différence par le service

Les fabricants de profils se distinguent par leurs produits qui peuvent, selon les gammes, être assez différents. Nombreux sont les métalliers à travailler avec plusieurs gammistes. Ces derniers cherchent à fidéliser les métalliers avec plusieurs leviers. « Nous encourageons fortement les professionnels à utiliser le logiciel Forster Pro. Cela les rend autonomes sur la conception, le dessin et le chiffrage avec accès à notre base de données de profils », insiste Antoine Duvey, responsable technique et digitalisation chez Forster. L’ancien de KDI et de l’entreprise Sud Métallerie, souligne aussi que par service il faut entendre l’aide au « lancement d’activité ». Qu’est-ce donc ? « Nous accompagnons les métalliers dans le démarrage d’une activité de menuiserie acier. Cela va de la formation des compagnons aux conseils d’organisation dans l’atelier et des outils à acquérir ». Les deux autres gammistes, Jansen en tête, s’efforcent évidemment aussi à accompagner de la sorte les métalliers.

3. La communication a fait un sacré bon !

Rappelons-nous comment se traitait la communication sur les profils acier il y a vingt ans. Essentiellement par deux canaux : la publicité en presse spécialisée et les salons du bâtiment. Entre-temps les magazines grand public du secteur maison et déco se sont pris d’enthousiasme pour les belles verrières en acier. Le public a adoré. Aussi les trois fournisseurs leader Forster, Jansen et RP Technik ont inauguré leur showroom parisien. Tous sur la rive droite, histoire de se rapprocher des architectes et des designers plus nombreux à l’est de la capitale. Mais surtout les métalliers se sont attelés à leur communication. Une nouvelle génération de dirigeants métalliers ayant grandi avec les smartphones et les réseaux sociaux a pris les choses en main. Ces métalliers qui ont fait progresser leur organisation et leurs outils, savent mettre en lumière leurs équipes, leurs chantiers et leurs ouvrages. C’est nouveau et remarquable ! De fait, via un relais de plus en plus large de « followers », dont de nombreux architectes, la menuiserie acier a bénéficié d’un support d’image de marque totalement inédit et inimaginable il y a deux décennies.

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© Pyc

4. Thermolaquage et traitement de surface en pointe

Il ne peut y avoir d’essor dans la menuiserie acier sans un traitement de surface et un laquage irréprochables. L’aluminium aura habitué le marché à ce que cette question ne soit plus un sujet de discussion et encore moins de litiges… Il y a bien, surtout avec les profils fins à rupture thermique, des risques de déformation lors du passage dans le four de cuisson. Or, les métalliers et leurs thermolaqueurs se sont progressivement calés et, indépendamment des labels de qualité qui se développent plus ou moins vite, le niveau de la prestation a gagné en technicité. On note aussi un intérêt de certaines PME à intégrer une chaîne de thermolaquage afin de gagner en réactivité et en sérénité.

5. Montée en puissance des « industriels »

Force est de constater qu’en deux décennies le nombre et la taille des acteurs spécialisés dans la préfabrication de menuiseries acier ont plus que doublé. Citons des entreprises comme Chauvet, Deveugle, FMA / F2M, Oxium, Technifab, Unimétal, VD Industry et même Finemétal créé il y a deux ans… Ils ont à leur façon contribué à l’essor du secteur par leur capacité à fournir de grandes séries de châssis avec une qualité constante et dans des délais et des coûts maîtrisés. Leurs clients sont des menuisiers aluminium, des entreprises générales mais aussi des métalliers qui n’ont pas (ou plus…) les compétences en interne pour fabriquer des menuiseries. Le fait qu’un industriel comme Portalp rachète l’entreprise Deveugle et que VD Industry soit passé sous contrôle du groupe belge Haerens indique bien qu’il y a une dynamique favorable pour la menuiserie acier en France.

Ouvrir les portes aux prescripteurs

« C’est un lieu de rencontres et d’affaires », résument en chœur François-Xavier Chéreau (KMF) et Sophian Kallel (RP Technik). Le nouvel espace dédié aux solutions RP Technik inauguré il y a quelques mois à deux pas de la place de la Nation à Paris marque un tournant. Bien plus qu’un showroom, il s’agissait d’avoir une vitrine conviviale et efficace au plus près des architectes, mais aussi des préfabricateurs et des métalliers de passage dans la capitale. « Il est difficile de demander à nos clients de passer nous voir au siège de KMF à Aubervilliers au nord de Paris. Au 303 rue du Faubourg Saint Antoine à Paris, facilement accessible en transports en commun, toutes les conditions sont réunies pour travailler dans un cadre moderne, confortable et équipé pour assurer des réunions en présentiel comme en visioconférence », soulignent-ils. Une vitrine dédiée à la menuiserie acier ouverte sur la rue en plein Paris, qui aurait pu imaginer cela, il y a vingt ans ?