Slavi Ditchev, ingénieur et directeur général de Kemppi France est un expert du soudage. Il nous éclaire sur les mutations techniques qui ont radicalement transformé ces appareils si essentiels en métallerie.

À la fin des années soixante-dix il y a eu le lancement du premier onduleur de soudage alors que tout le monde utilisait encore des transformateurs. Ils n’étaient pas nombreux à y croire. C’était plein d’électronique, donc ça ne pouvait pas tenir selon la pensée dominante de l’époque. Or, les onduleurs ont permis de réduire le gabarit, le poids et la consommation électrique sans parler de la fiabilité. Ensuite, le second pas de géant a été franchi avec la digitalisation des postes à la fin des années quatre-vingt-dix et début 2000. Nous avions été les premiers à lancer un onduleur digital mais nous n’avons pas été très bons pour le faire savoir. Nous nous étions retenus à communiquer sur la digitalisation craignant que cela fasse fuir les soudeurs… Notre principal confrère a lui, au contraire, forcé sur ce terrain en parlant de « révolution numérique ». Avec la digitalisation, sont arrivés les programmes. Les calculs savants comme la vitesse de détachement de la goutte sans abuser de l’énergie consommée, sont opérés par le poste. Il y a un transfert d’intelligence de l’opérateur vers la machine. Le résultat est une constance dans la soudure et de notables gains de productivité. En résumé, il est devenu plus facile de faire une bonne soudure. Le poste fonctionne mieux sans que l’on ait besoin sans cesse d’agir sur le poste. Les courbes digitales se règlent avec un seul bouton tant pour la vitesse que pour l’intensité. Aussi les fonctions intelligentes permettent de souder dans des endroits difficiles où la torche ne pourrait pas accéder.

Toujours plus de fonctionnalités

À l’avenir, il n’y aura pas de grandes révolutions dans le soudage après celle de la digitalisation. Il y aura plutôt des fonctionnalités en plus. On peut comparer les postes à souder de demain avec l’automobile qui aujourd’hui propose le stationnement automatique. C’est une aide mais pas un robot. L’aide au soudeur et l’augmentation du confort de travail sont des facteurs clé dans cette progression.

L’impératif de suivi de la qualité et de la traçabilité, les normes comme les réglementations ont profondément modifié l’attente vis-à-vis du soudeur et donc vis-à-vis de la machine. Nous sommes d’ailleurs en mesure de suivre à distance via le Cloud la qualité de la soudure d’une opération. Aussi, il faut savoir que la robotisation du soudage est en marche et un véritable créneau de développement pour les fabricants. La France n’est pas le plus gros marché comparé à l’Allemagne ou l’Italie ou cette tendance est bien plus marquée.

Cobotique ou robotique ?

Au sein du Symop, dont je suis président du groupe soudage coupage depuis 2009, nous travaillons sur le robot et sa démocratisation. Dans l’automobile le robot de soudage est connu depuis des décennies tout comme dans l’agroalimentaire avec des applications répétitives. C’est devenu une technologie plus souple et plus facile à intégrer dans un process. Il y a cependant un distinguo à faire entre robotisation et automatisation. Certains dirigeants de PME veulent faire installer un robot alors que souvent une ligne automatisée suffit pour faire de petites séries. Les débouchés et les développements futurs sont pour la cobotique. La collaboration homme-robot aura un bel avenir aussi longtemps que les difficultés de recrutement de bons soudeurs perdureront. La cobotique représente un investissement moins lourd que la robotisation et elle répond à bon nombre d’applications, dont la métallerie.

Enfin, il est important de souligner aussi les évolutions techniques dans les torches. Notamment avec les commandes au bout de la torche et la digitalisation ce qui permet un allègement de la pièce et une plus grande ergonomie. La torche aspirante restera plus lourde mais elle est toujours une solution efficace pour la sécurité et la santé des soudeurs. Cette question des fumées arrive à un seuil critique. Si on applique strictement la loi et les normes, il faudrait arrêter de souder. En trente ans, la loi n’a jamais cessé de se durcir. Mais la normalisation avance plus vite que les progrès technologiques, car il est plus facile de modifier la norme. Slavi Ditchev