Il a fallu quatre mois d'études à l'entreprise de métallerie avant de lancer la production des portails. Il a fallu quatre mois d'études à l'entreprise de métallerie avant de lancer la production des portails.
Cet ensemble aux portes de Paris appelé 19 M accueille la Manufacture de la mode. Imaginée par Rudy Ricciotti pour Chanel, elle est dédiée aux « petites mains » de la haute couture qui y trouvent un espace de travail optimisé. Les portails réalisés par une métallerie des Bouches-du-Rhône sont à eux seuls des pièces d’orfèvrerie.

Portails en haute couture

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La haute couture pourrait se définir par la mise en commun de dizaines de métiers et de centaines de petites mains. Chez Chanel on sait depuis toujours que sans la multiplicité des compétences et sans ce tissu artisanal de haut niveau, la marque de luxe ne serait rien. Il est question ici de brodeurs, de chapeliers, de bottiers, de joailliers, d’experts en plumes, en perles et en paillettes… Ces compétences sont généralement installées dans ce qui reste d’ateliers relativement « éparpillés » dans la capitale. « Ces ateliers sont devenus trop petits. Pour qu’ils continuent à se développer et attirer de nouveaux talents, il fallait redonner une impulsion à l’histoire », explique Bruno Pavlosky, président des activités mode de Chanel. C’est ce qui a décidé la marque de franchir un palier décisif en faisant construire un ensemble de bâtiments aux portes de Paris, à Aubervilliers. Ce sont 25 000 m2 de planchers sur cinq niveaux qui se dressent aujourd’hui sur cette ancienne friche industrielle de 9 000 m2. Une quinzaine de métiers d’art seront représentés et pas moins de 600 personnes devraient y travailler tous les jours. Après la désindustrialisation de la ceinture parisienne dans les années quatre-vingt, le 19 M « marque le grand retour d’une activité manufacturière qualifiée. On peut imaginer qu’elle entraînera une activité de sous-traitants », estime Yannick Beltrando, urbaniste.

Un alliage d’aluminium plus ductile

C’est l’architecte Rudy Ricciotti qui a conçu cet ensemble en ossature béton habillé d’une résille en béton fibré évoquant une toile textile. Cet exosquelette signe l’identité du site et les portails réalisés par la Serrurerie de la Parette se devaient d’en faire écho.

La métallerie de Roquefort-la-Bedoule (13) y a réalisé l’intégralité des ouvrages extérieurs de métallerie, dont des garde-corps en maille Inox (Webnet de Jakob) sur les coursives. « Nous avons fait de grandes grilles en caillebotis dans les patios, des ouvrages en toiture dont une grille permettant de masquer les équipements techniques, ainsi que des enclos techniques en aluminium avec bardage sur mesure en panneaux aluminium  », souligne Vincent Delaroque, codirigeant de la métallerie. C’est cependant le lot des quatre portails battants à double vantaux et un portillon qui l’a motivé à suivre Rudy Ricciotti dans cette opération. « Au départ nous devions usiner un motif dans une plaque d’aluminium de 25 mm d’épaisseur ». Or, l’architecte s’est décidé pour des ronds qui accentuent le clin d’œil à la maille textile sans essayer de singer la géométrie des façades ni apporter un motif radicalement différent. Il a fallu faire filer spécialement des ronds de 6 m de long et 16 mm de diamètre. L’alliage particulier qui a été retenu permet de mieux prendre la forme sous une presse, sans marquages ni craquelures. Cet alliage désigné par la nuance 1050/H112, a été choisi pour sa ductilité, c’est-à-dire sa capacité à se déformer sans rompre. Quatre mois d’études et de dessins en CAO/DAO ont été nécessaires avant de pouvoir lancer la production.

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Travail à la table d’usinage

Afin de former les ronds d’aluminium, la métallerie a usiné sur une table d’usinage à commande numérique les outils en PEHD. Le polyéthylène haute densité est certes un matériau coûteux, il offre cependant la particularité de ne pas marquer le métal. Ces outils ont été ensuite placés dans la presse plieuse. « À la table d’usinage ont également été réalisés tous les percements perpendiculaires et les découpes aux extrémités », précise Rémy Darrigade, codirigeant en charge de la production. Par la suite, c’est sur cette même table que l’on a réalisé les gabarits d’usinage pour la cinq axes dans un plateau de medium à l’aide d’une fraiseuse qui peut travailler sur une surface de 4 × 2 m. « La commande cinq axes fait tous les perçages en angle, les lamages et les taraudages. Au moment de l’assemblage, la vis Inox passe dans le premier rond. La tête cylindrique de la vis avec une empreinte hexagonale est noyée dans un lamage et vient se fixer dans le taraudage borgne du rond suivant pour plus de discrétion », indique Vincent Delaroque. L’assemblage des panneaux a été réalisé à la main en atelier et tout est tombé juste.

Notons enfin que les ronds en aluminium sont restés brut sans peinture ni anodisation. Plutôt brillants à la livraison, ils se sont patinés uniformément après plusieurs semaines d’exposition aux conditions atmosphériques locales.

Maître d’ouvrage : Chanel

Maître d’œuvre : Rudy Ricciotti, architecte

Entreprise générale : Groupe Fayat

Métallerie : Serrurerie de la Parette

Coût total : 102 millions d’euros

Description des portails

- Remplissage en ronds aluminium de diamètre 16 mm (40 kg/m2).

- 31 pièces de 2,5 m par mètre linéaire de grille, soit 3 565 ml de ronds pour les 46 ml de l’ouvrage.

- Cadre périphérique en plats aluminium 200 x 10 mm usiné puis fraisé afin de loger les extrémités des ronds qui sont percés taraudés en bout.

- Le cadre est monté sur une structure secondaire en tube rectangulaire 120 x 60 x 3 mm en acier inoxydable 304 L thermolaqué.

- Poteaux en tubes carrés d’acier inoxydable 304 L 150 x 150 x 5 mm débité au laser tube, finition thermolaquée.

- L’assemblage entre la résille (aluminium) et la structure (acier inoxydable) fait l’objet d’une isolation galvanique.

- Afin de permettre l’assemblage de la résille, 13 modèles d’usinage de rond ont été employés, combinant une variété de position et d’angle d’incidences pour les perçages taraudage borgnes et les perçages, lamages permettant de noyer les têtes des 5 700 vis.