Désormais adossé au groupe belge Reynaers, le gammiste acier Forster change de dimension. La France est prioritaire. Le bureau parisien est une vitrine et un espace de partage dans l’esprit du temps.

C’est un ancien atelier de fabrication de bâches, entre la Nation et la place de la République. La Rive droite de Paris où se trouvent bon nombre d’agences d’architectures et de design. L’espace de 400 m2 sur deux niveaux est devenu il y a vingt ans un loft aménagé pour une agence de communication. Depuis mi-2020, c’est le groupe familial belge Reynaers qui en est le propriétaire. Un investissement conséquent, près de 4 millions d’euros. Il envoie un message clair : Reynaers veut monter sur le podium des gammistes acier et aluminium en France. Le groupe qui a racheté fin 2017 l’entreprise suisse Forster, a de solides ambitions et tient à le faire savoir. L’adresse du 46 rue Chanzy dans le XIe arrondissement accueille la moitié de l’équipe française du spécialiste de la menuiserie acier. Les équipes dédiées à l’aluminium basées à Lieusaint (77), trouvent ici l’opportunité d’avoir un lieu de travail et de rendez-vous en plein cœur de Paris. Pour être dans l’esprit du temps et dans un mode collaboratif, le groupe y accueille aussi des entreprises partenaires tels que Vitrumglass (verres connectés) et EffEff France (solutions de verrouillage et de gestions des accès). Une salle de réunion équipée pour des visioconférences pourrait accueillir, par exemple, des professionnels de la métallerie pour des Webinaires… Sans oublier que les cloisons et les fenêtres qui participent à l’aménagement lumineux, sont en profilés Reynaers Aluminium et Forster.

À l’occasion de notre visite, nous avons rencontré Martine Reynaers, la présidente, de passage à Paris.

Métal Flash : Votre groupe a le vent en poupe depuis quelques années. Quelle est votre recette pour ce succès ?

Martine Reynaers : Nous avons une belle offre je pense. Elle est complétée avec des services et une approche de qualité globale. Nous cherchons à tisser des partenariats avec nos clients qui sont souvent des sociétés familiales comme la nôtre. Nous voyons deux éléments nouveaux : les produits deviennent assez complexes et méritent un accompagnement plus étroit, ensuite il y a la digitalisation et l’automatisation du process. Là aussi nous devons apporter plus que des barres d’aluminium. Dans notre siège à Lieusaint nous apportons clairement et concrètement des clés de gains de productivité et des conseils d’investissement et d’organisation. Dans le processus d’accompagnement des clients, nous démarrons avec les outils de visualisation, puis de devis et commande avec un suivi sur Internet. Ensuite il y a la conception/fabrication et les outils de suivi sur chantier grâce au passeport digital qui concerne chaque châssis à poser, avec ses caractéristiques techniques. Nous avons misé fortement sur ce terrain et ça semble porter ses fruits.

M F : Existe-t-il un client type au sein du groupe Reynaers ?

M R : Non, le panel reste large entre l’artisan et la PME industrielle. Les métalliers sont aussi bien présents sur l’aluminium que sur l’acier et sont bien dans cette configuration d’artisans et d’ETI pour quelques-uns. En revanche, nous sentons un intérêt grandissant pour la digitalisation, dans l’acier comme dans l’aluminium. Il y a l’e-commerce et au-delà.

M F : La distribution de vos produits restera en direct ?

M R : Oui, c’est notre centre logistique près de Saint Quentin en Picardie (9 000 m2 et à terme 14 000 m2), qui livre aussi bien l’acier que l’aluminium. Le centre logistique est en phase d’agrandissement. C’est une force de pouvoir optimiser la logistique pour les deux marques de notre société.

M F : Quels sont vos objectifs en termes de part de marché ?

M R : Sur l’aluminium nous sommes derrière le trio de tête avec une part de marché de 10 %. En acier, Forster est 2e derrière Jansen. L’objectif est de monter en puissance et nous méritons une place plus prestigieuse pour Forster. Avec une plateforme logicielle commerciale commune entre Reynaers Aluminium et Forster, les équipes peuvent communiquer et discuter pour affiner leurs propositions sur les projets qui mélangent souvent acier et aluminium. Cette synergie va booster l’activité sur les deux matériaux. Les équipes resteront cependant distinctes car les métalliers ont d’autres besoins sur l’acier que sur l’aluminium. Les attentes ne sont pas les mêmes et c’est une autre approche. Les deux équipes se comprennent et s’entendent bien ; chaque marque a sa propre culture. C’est une période très enthousiasmante sur le plan commercial.

M F : Comment définiriez-vous l’image de Forster en France ?

M R : Depuis 40 ans que je suis dans ce métier, j’ai toujours connu Forster comme une marque de qualité entourée par des équipes de qualité. Les équipes de KDI qui nous ont rejoints sont aussi très motivées et imprégnées par l’identité de la marque. Le profilé Unico, par exemple, est un vrai produit de marque premium, il y a des adeptes de l’Unico et c’est réjouissant.

Il y a aussi l’innovation. Par exemple, nous avons passé avec succès un test CR4 pour une porte vitrée en Forster Unico. C’est une consécration et nous sommes fiers de ce développement. L’innovation consiste à anticiper les besoins du client en prenant même parfois un peu de risques.

M F : La réglementation environnementale RE 2020 fait du bruit sur le terrain de l’impact carbone des matériaux. Quel est votre regard sur cette question ?

M R : Certains ont beaucoup mis en avant la recyclabilité de l’aluminium, nous sommes sereins sur nos arguments. Le bois ne pourra pas se substituer sur toutes les applications qui sont aujourd’hui occupées par le métal voire pour le PVC. Le bois trouvera une place c’est évident mais nous allons soutenir le passage à une économie circulaire sans aucune crainte, c’est une évidence. Une menuiserie aluminium ne finira jamais dans une décharge, la demande en matière à recycler est toujours grande. C’est une matière circulaire par excellence. Le bois est tendance, mais il faut savoir rester réaliste.

M F : La France est au carrefour entre la Pologne et le Portugal, deux pays à bas coûts de main-d’œuvre. Est-ce une menace pour votre développement ?

M R : En Pologne, les chefs d’entreprise grognent car l’Europe de l’Ouest attire la meilleure main-d’œuvre et je pense que leur niveau de vie va monter et les salaires avec. L’écart se réduira. Nos clients français ont comme atout la proximité, la réactivité et la capacité à intervenir en service autour d’un projet. La digitalisation va aussi permettre une augmentation de la performance des entreprises françaises. Ça n’est donc pas une menace pour nous. Ceci étant, je suis globalement une personne confiante, on ne peut pas être autrement dans ma position.

M F : A ce sujet, vous qui êtes friande de science-fiction, comment voyez-vous l’avenir à moyen terme ?

M R : (Rires) La science-fiction nous impose une vision de l’avenir et je crois dans cet avenir. Avec mon mari nous avons quatre enfants, il est impossible de ne pas être confiants. Dans ma vie personnelle et professionnelle j’ai eu l’occasion de rencontrer beaucoup de bonnes personnes et quelques-unes un peu moins bonnes. Mais nous voyons bien combien la solidarité fonctionne en cette période si particulière. Aussi la réactivité des chercheurs autour du vaccin a été étonnante. Nous avons de la ressource et il est intéressant de la mettre au service de tous.