La pandémie a bouleversé les habitudes. Le travail à distances et les outils de visioconférence ont créé de nouveaux comportements à l’égard de l’information. Pourquoi devrait-on encore aller sur un salon ? La dernière édition d’Equipbaie-Métalexpo a été instructive sur plusieurs points.

Un besoin d’échanger !

C’était le premier salon du bâtiment depuis la sortie de confinement. Le tandem Equipbaie – Métalexpo qui s’est tenu du 21 au 24 septembre, allait de toute manière être un cru particulier. Les incertitudes restaient cependant immenses concernant l’enthousiasme des visiteurs et des exposants à renouer avec les habitudes d’avant pandémie. Malgré les efforts importants entrepris par le Pôle Fenêtre FFB, le résultat a été sans surprise : l’organisateur a annoncé une baisse de 42 % du nombre de visiteurs et une centaine d’exposants en moins par rapport à la précédente édition de 2018. Inutile de tirer sur l’ambulance, ça n’a aucun intérêt. En revanche, il est possible de tirer quelques enseignements intéressants de cette manifestation post-confinement.

Métal Expo a bien résisté

Même si ça ne sautait pas aux yeux, l’espace dédié au salon des métalliers s’est plutôt bien tenu par rapport à 2018. Sur la vingtaine d’exposants présents nous avons pu compter sur des nouveaux qui ont apporté un complément d’offre utile. On pense, par exemple, à Flex, fabricant d’outils électroportatifs (meuleuses et perceuses en particulier) et à Pferd, fabricant de disques abrasifs premium, deux industriels allemands pleinement positionnés sur le créneau de la métallerie. On pense aussi à France Machines Outils qui a exposé une table plasma de Phénix Technologie ou à Fortal qui présentait ses solutions d’accès et de sécurisation des toitures. Outre l’Union des métalliers qui occupait comme d’habitude une place centrale, il faut saluer la présence de plusieurs partenaires de l’organisation professionnelle. Évidemment le trio des gammistes acier : Forster, Jansen (Descasystem) et RP Technik (KMF). Mais aussi ArcelorMittal, Bugal, Etanco, Ficep, Gantois, Media Softs, Prestia, Solarlux, Topsolid et Würth.

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L'Allée de la métallerie démarre avec la CAO/DAO et se termine avec la peinture. /Bugal a présenté dans la bonne humeur ses garde-corps prêts à poser.

L’Allée de la métallerie a fonctionné

C’est un fait encourageant. Le découpage thématique de la métallerie de la conception jusqu’au traitement de surface a plu. L’éditeur de logiciels CAO/DAO Trimble en début d’allée, a été suivi par ArcelorMittal pour la fourniture des aciers, par Ficep pour les lignes automatisées d’usinage, par Canamétal pour la sous-traitance de fabrication puis par Prestia et Star Coater pour la protection anticorrosion et la peinture. Bien évidemment il manque ici quelques étapes clés (assemblage, pliage, découpe, poinçonnage…), mais l’idée est là : la démonstration séduit et les visiteurs apprécient d’avoir une disposition par flux de production.

L’échange une nécessité essentielle

La période liée à la pandémie a donné un coup de fouet à la transition digitale des entreprises de métallerie. Ça ne fait aucun doute. La majorité des cadres et des dirigeants du secteur sont devenus coutumiers des visioconférences et des outils permettant de travailler à distance. Cependant, contrairement aux secteurs qui intègrent essentiellement des produits fabriqués par des industriels (c’est le cas du store et de la menuiserie, par exemple), la métallerie est en interface avec une multitude d’intervenants. Que ce soit des fournisseurs de matière première, des fabricants de machines, d’autres corps de métiers et plusieurs types de donneurs d’ordres. À un moment donné, la réunion à distance ne suffit plus. Le salon a permis de mesurer l’importance des échanges en présentiel, et pas seulement pour des raisons de convivialité.

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Présentation du nouveau centre d'usinage SBZ 118/20 d'Elumatec. /L'équipe de l'éditeur de logiciels Média Softs a toujours le sourire.

Des visiteurs motivés

C’est là un tournant décisif par rapport aux précédentes éditions et cela vaut sans doute pour tous les salons spécialisés. Compte tenu de l’offre digitale qui permet de répondre à un grand nombre de questions que se posent les professionnels, ne se déplacent que ceux qui ont véritablement un projet ou une problématique à traiter. Cette analyse peut paraître un brin catégorique, c’est pourtant ce qui ressort de nos entretiens avec les exposants. « Ils étaient moins nombreux, mais nettement plus demandeurs d’informations et avec des besoins précis », s’accordent-ils à dire. Certains exposants ont d’ailleurs finalisé des ventes importantes sur leurs stands, que ce soit en machines ou en logiciels. « Le qualitatif à défaut de quantitatif », c’est le type d’évolution qui convient bien aux exposants, aux organisateurs de salons à en tenir compte à l’avenir…

Mais aussi des absences…

Si l’on veut être cohérent et être représentatif du métier alors il faut bien reconnaître qu’il manque des pans importants. La ferronnerie, même si elle ne pèse pas plus de 5 % du chiffre d’affaires dans la métallerie, mériterait une place. Mais deux volets considérables sont quasiment invisibles tant sur Equipbaie-Métalexpo : le verre et le soudage. Le premier occupe une part majeure dans l’activité et comme il est constante évolution il mérite une présence plus affirmée. L’absence d’un des quatre ou cinq acteurs phare du soudage est en revanche une anomalie. D’autant que ces industriels peuvent avoir sur leurs stands des démonstrations en réalité virtuelle. Enfin, la métallerie est déjà en train de s’intéresser aux robots, aux exosquelettes et à l’impression 3D. Des absences qui peuvent fragiliser l’attractivité du salon.

Une vitrine des activités de l’Union

L’Union des métalliers a mis le paquet. Le salon a été l’occasion pour l’organisation professionnelle de faire la démonstration de sa capacité d’intervention sur une vaste palette de sujets. Outre les thématiques techniques de ses Commissions, il a été fortement question des futurs métalliers. Entre les pièces primées du concours Métal Jeunes exposées sur le stand, la promotion des Worldskills avec son ambassadeur Francis Perrot-Minnot et la montée en puissance du Club de la Métallerie, la plateforme de soutien aux jeunes en compétition, l’Union a engagé une dynamique inédite en direction des jeunes. Un temps fort a été la venue sur le stand des élèves en métallerie du Lycée Augustin Hébert d’Évreux (27) avec leurs enseignants. Aussi, les visiteurs ont pu voter pour leur œuvre favorite parmi celles exposées et c’est Marcello Tartaruga de la section BP Métallier du CFA Marcel Rudloff de Colmar (68) qui a remporté le « prix du public ». L’union a également remis officiellement les CQP (Certificats de qualification professionnelle) pour les métiers de « concepteur dessinateur en métallerie », « chef d’atelier en métallerie » et « chargé d’affaires junior en métallerie ».

Quelle est l’image du métier ?

Didier Lenoir (Métallerie Lenoir), Francis Perrot-Minot (formateur aux Compagnons du devoir) et Alain Quenel (Serrurerie de la Parette) ont participé à un débat intéressant sur Batiradio. À la question du journaliste sur ce qu’est la métallerie, Didier Lenoir, président de la Commission formation à l’Union des métalliers a dû reconnaître que l’on « ne sait toujours pas définir facilement le métier ». Le déficit d’image de la métallerie est toujours criant car ce métier n’a pas d’image… Tous les métalliers peuvent parler avec passion de leur métier, mais tant que le jeune n’a pas touché la matière et les outils, il ne se fait qu’une image abstraite, voire une image négative de cette activité. De son côté Alain Quenel, engagé depuis des décennies dans la transmission des savoirs à l’attention des jeunes, explique que l’on a « du mal à faire passer avec les mots l’immense richesse de notre activité ». Francis Perrot-Minot a raconté comment il a suivi les pas de son père et de son grand-père qui, très tôt lui ont fait goûter les joies du bricolage avec l’acier et par la suite du soudage. Alain Quenel n’a pas eu peur d’interpeller ses confrères métalliers que ce qui a pu apparaître un temps comme un tabou : le nombre élevé de métalliers qui ne veulent plus accueillir d’apprentis. « Former les jeunes c’est aussi de notre responsabilité, a-t-il martelé. Aussi, nous devons réussir à nous adapter à tous les publics dans la société. Aujourd’hui la qualité de vie et les conditions de travail sont primordiales ». Didier Lenoir a poursuivi en précisant qu’il faut « être plus attractifs et avoir un tutorat avec des personnes sachant communiquer avec les jeunes, c’est une qualité essentielle ». Pour Francis Perrot-Minnot il est évident que la métallerie évolue à grande vitesse grâce à l’intégration de moyens high-tech qui tôt ou tard finiront par attirer des profils de bon niveau ce qui améliorera logiquement l’attractivité de la profession.